Interview de Laëtitia, fan de Marilyn Monroe et gérante du blog Crazy for you

Aujourd’hui, je cause avec une dame dont à propos de laquelle j’ai déjà parlé dans ma rubrique Marilyn, toujours en soulignant à quel point ladite dame faisait du bon boulot sur son blog. Cette dame, elle s’appelle Laëtitia, et son blog Crazy for you. J’ai voulu savoir d’où cette fan et collectionneuse tenait cette rigueur qui manque tant aux journalistes et aux biographes de MM. Si toi aussi tu veux savoir, t’as plus qu’à scroller.

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Toutes les photos de l’article sont des photos de la collection de Laëtitia prises par Laëtitia elle-même

Gibet : Quand a commencé votre passion pour Marilyn Monroe et suite à quelle rencontre ?

Laëtitia : Ma passion a commencé en 1990 à la suite de la diffusion du téléfilm Marilyn, une vie inachevée avec Catherine Hicks dans le rôle principal. En fait il y avait dans le magazine télé que j’avais, pour ne pas le nommer, Télé Loisirs, un article avec des photos d’Ed Feingersh datant de mars 1955. La particularité de ces photos est que nous avons l’impression d’entrer dans l’intimité de la star. Feingersh l’a suivie pendant une semaine et a pu la photographier dans son quotidien de star. Ces photos m’ont profondément marquée. Vous couplez avec le téléfilm qui bien évidemment donne la part belle au côté mélodramatique de la vie de Marilyn et forcément quand vous êtes une jeune ado, cela vous marque. Une si belle femme, si triste…

J’ai gardé les photos et l’article, j’avais aussi enregistré le téléfilm dont j’ai toujours la K7 ! Je ne sais pas vraiment comment j’ai vu ma passion naître. Je sais juste que j’ai commencé à garder des photos, que j’ai vu mon premier film à la télé en mai 1991, Certains l’aiment chaud en VOSTF (que j’ai toujours aussi). L’été un documentaire inédit passait sur Canal Plus, il fallait que je le vois ! Je sais que ce Noël 1991 j’avais commandé au Père Noël un livre sur sa vie Marilyn, vie et légende (un magnifique livre que je conseille encore aujourd’hui pour la grande qualité et la rareté des photos et par le récit presque parfait de sa vie).

Et puis en 1990, 1991, il y avait beaucoup de magazines, d’articles, de photos sur Marilyn. Je me rappelle aussi les posters que je voulais avoir. En fait je m’aperçois que je suis très vite devenue une fan pure et dure. En 1992, il fallait déjà que j’achète tous les magazines où elle se trouvait en couverture et le plus de livres possible !

Gibet : Ça fait donc grosso modo 25 ans que vous êtes fan de Marilyn. Est-ce qu’à travers les années vous avez remarqué des pics d’intérêt ? Des variations dans ce qu’on montre ou dit d’elle ?

Laëtitia : En 25 ans, la société change, tout comme moi. Forcément mon regard sur Marilyn évolue à travers les années ainsi que ma passion. Je fais partie de ces fans/collectionneurs qui n’ont pas que Marilyn dans leur vie même si elle est une partie de ce que je suis. J’ai des moments où j’ai besoin de prendre mes distances. Par exemple avant mon intérêt était principalement lié à son actualité : commémoration de sa mort, de son anniversaire, de la sortie de livres, de documentaires… Aujourd’hui c’est très différent. Il faut aussi prendre en compte Internet qui a considérablement changé la vie des fans. Demain nous pouvons découvrir une photo, une séance photos inédite et être amenés à faire des recherches ou à compléter avec les informations que nous avons déjà.

Et puis moi j’ai changé, au début je n’étais qu’une jeune adolescente, aujourd’hui je suis une adulte, d’une certaine façon je comprends beaucoup mieux certains aspects de sa vie. Et si mon regard a changé, celui de la société aussi. Quand j’ai commencé, Marilyn était principalement une image magnifique qui avait quelques fêlures et surtout sa mort était LA discussion du moment ! Au cours des années 90 c’était LE sujet ainsi que son dernier film inachevé. Des livres de photos inédites sont sortis mais seulement en anglais donc vraiment pour les fans à l’époque (c’était galère de les trouver). En 1999, la vente de Christie’s a changé beaucoup de choses. Tout à coup les reliques Marilyn devenaient des Saint Graal… posséder une part de la légende. On a commencé à la décortiquer. On ne voulait plus savoir comment elle était morte mais voir ce qu’il y avait à l’intérieur. Nous avons atteint le sommet (jusqu’à présent) avec la sortie du livre Fragments en 2012. Entre temps les romanciers avaient pris possession d’elle pour en faire une image erronée.

Gibet : Sur votre blog, on peut voir que vous êtes fan aussi de Madonna. Est-ce que vous êtes venue à elle parce qu’elle se place dans la continuité de Marilyn ?

Laëtitia : En fait en y réfléchissant, je pense que c’est Madonna qui m’a fait venir à Marilyn. Madonna a été la première blonde de ma vie. Quand j’avais 10 ans, je voulais absolument voir le concert du Who’s That Girl Tour qui passait en exclusivité sur Antenne 2 (si je me souviens bien). Au collège j’ai rencontré une gamine qui était vraiment fan de Madonna et c’est elle qui m’a fait basculer sur Marilyn qu’elle aimait aussi. Au final, c’est un ensemble de choses qui se passe en même temps pour former un tout. C’est une suite logique.

Pour revenir à Madonna et Marilyn, elles ont pour moi toujours été très différentes. Je n’ai jamais compris pourquoi on voulait faire de Madonna une nouvelle Marilyn. Elle a joué avec l’image de la jolie blonde californienne, a rendu de très beaux hommages à Marilyn mais elle en a toujours été différente. Ma passion n’est pas la même. Je les conçois très différemment, leur seule ressemblance est la couleur de cheveux.

Gibet : Être fan, pour vous, ça implique d’être inconditionnelle ?

Laëtitia : Absolument pas ! Ce serait une erreur. Pour moi être fan ce n’est pas être aveugle. Il faut savoir regarder, comprendre, expliquer. À propos de Marilyn je n’ai pas à juger de sa vie. Je suis juste une observatrice. Je ne suis pas une contemporaine de Marilyn, je suis comme une historienne qui regarde des faits. Je ne connais pas l’époque dans laquelle elle vivait, je ne peux pas juger.

Par exemple, je peux dire que faire Le Milliardaire avec Montand, n’était pas une bonne idée. Elle régressait au niveau rôles pour revenir vers ce qu’elle fuyait 6 ans plus tôt. Mais je sais qu’elle n’avait pas le choix parce qu’elle avait un contrat à respecter, et à l’époque, vous ne pouviez pas dire non surtout après l’exceptionnel contrat qu’elle avait signé. La relation aux grands studios hollywoodiens était très dure, les acteurs n’avaient pas leur mot à dire. En fait je m’interdis de juger parce que personne ne fait des choix parfaits.

Gibet : Vous n’aimez pas Le Milliardaire ?

Laëtitia : Ce n’est pas que je n’aime pas Le Milliardaire mais c’est un film ennuyeux… comme la plupart des films de Marilyn d’ailleurs ! Il faut bien avouer qu’ils ont très mal vieilli en dehors de Niagara, Sept ans de réflexion, Les Hommes préfèrent les blondes et Certains l’aiment chaud, tous les autres sont très emprunts de leur époque et certains beaucoup plus que d’autres ! Il faut bien le reconnaître, Marilyn avait parfaitement raison lorsqu’elle disait qu’on ne lui proposait jamais de bons films.

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Gibet : C’est amusant que vous parliez de regard d’historienne car en général les gens qui écrivent des livres sur Marilyn Monroe ne se posent pas du tout la question du regard, et avancent au petit bonheur la chance sans souci de vérité ou d’honnêteté intellectuelle. À ma connaissance, il n’y a pas de biographie historique et/ou universitaire de Marilyn. Deux questions : est-ce que vous parlez en ces termes parce que vous avez une formation d’historienne ? Vous rêvez pas des fois que vous serez celle qui fera la biographie qui supplantera toutes les autres ?

Laëtitia : Alors pour moi il existe une biographie que l’on peut qualifier d’historique, c’est celle faite en 1993 par Donald Spoto. Il relate des faits. Il a réalisé un travail minutieux, il reste incontestablement l’une des plus grandes références en la matière.

Je ne suis pas historienne, je n’en ai pas du tout le cursus. Aujourd’hui ce serait une formation qui me plairait mais en France nous devons choisir sa vie à l’âge où nous n’y connaissons rien ! Je ne crois pas avoir assez de compétences pour faire une biographie et ce serait plus que prétentieux de dire que ce serait LA biographie. Personne n’a toute les informations, la preuve en est que nous en découvrons chaque jour ! Écrire un livre est un métier à part entière, certains écrivains posent simplement leur fantasme sur papier quand d’autres aiment aller plus loin dans l’analyse. Et puis cette question est bizarre. Le but n’est pas de se glorifier d’avoir fait une bio sur Marilyn mais de partager des connaissances voilà tout l’intérêt d’Internet ! Ce serait vaniteux de penser posséder tous les savoirs sur Marilyn.

Et puis moi les bio ça me gave, certainement d’en avoir trop lu. Lire des gens ne l’ayant jamais connu parler d’elle ne veut rien dire hormis si ils restent sur le factuel. Rien ne vaut un beau livre de photos parce que là c’est Marilyn qui vous parle !

Gibet : Puisque vous dites qu’il faut s’intéresser à l’ensemble, est-ce que vous vous intéressez à Hollywood en général ?

Laëtitia : Oh oui ! Ça a été très vite. Dès mes premières lectures marilynesques j’ai voulu en savoir plus sur les réalisateurs avec qui elle voulait travailler, alors forcément de fil en aiguille… Lorsqu’en 1995 le cinéma a eu 100 ans, j’ai acheté bon nombre de livres et magazines. J’ai par exemple demandé en cadeau le dictionnaire sur le cinéma parce que Marilyn était en couverture (une toute petite photo parmi d’autres). C’est devenu une bible pour moi. J’ai voulu voir tous les grands classiques, tous les courants du cinéma du XXème siècle. J’ai passé bon nombre de mes dimanches matin à aller au cinéma, j’enregistrais les classiques qui passaient dans l’émission Le Cinéma de minuit. J’ai dévoré le cinéma hollywoodien passé présent futur.

C’est identique pour la photographie. Comment comprendre l’impact d’une séance photo si vous ne comprenez pas le travail du photographe ? Comment admirer le travail de Richard Avedon ou de Cecil Beaton si vous ne savez pas qui il est ? Marilyn a côtoyé les grands noms de son époque sur tous les plans. Il faut les connaître ainsi et surtout l’époque dans laquelle ils évoluaient. Mon anecdote préférée ? Celle d’Ella Fitzgerald, bien sûr ! Ou comment Marilyn Monroe, actrice blanche, a permis à une chanteuse noire de pouvoir jouer sur la scène d’un bar blanc et par conséquent de lancer sa carrière.

Gibet : Sur votre blog, on peut entrevoir que vous avez une colossale collection. Quand cette collection a-t-elle commencé et pourquoi ?

Laëtitia : Ah ma collection ! Comme je vous l’ai dit plus tôt, elle a commencé immédiatement. Bien évidemment dans les premiers temps j’ai fait des horreurs : découper les articles, les couvertures (même d’époque !), coller les cartes postales, punaiser les posters… En tant que collectionneur, ces actes sont des hérésies. C’est une question très philosophique en fait : doit-on mettre sous verre tout ce qu’on possède ou bien le laisser vivre ? Mais ce n’est pas la question aujourd’hui.

Pour en revenir à la collection, je ne pourrais pas expliquer pourquoi j’ai voulu posséder. Je pense que la réponse est dans ma vie. La possession a quelque chose de rassurant. C’est comme un cocon que vous créez. Je peux répondre qu’au-delà des objets ce sont les photos qui m’ont toujours fascinée chez Marilyn. J’ai toujours souhaité avoir le plus de photos possible. Donc on retrouve des livres, des cartes postales, des magazines, des posters en grande quantité. Je peux dire que j’ai plus d’une centaine de livres qui lui sont entièrement consacrés (je crois). Ajoutez ceux qui lui consacrent juste la couverture, quelques photos, un dossier et là vous augmentez, je pense, d’une cinquantaine. Les cartes postales j’en ai plusieurs centaines, peut-être mille, j’en sais rien en fait. Je ne compte pas. Je l’ai fait au début ça a un côté challenge mais très vite c’est le fait de découvrir de nouvelles photos qui l’emporte, qu’importe le nombre. C’est comme une chasse au trésor, trouver l’objet qui vous procurera une sensation de bien-être… comme une drogue.

Gibet : Comment vous stockez tout ça ?

Laëtitia : J’ai une pièce consacrée à mes passions. La moitié est à Marilyn, l’autre est à Madonna et l’animation japonaise. C’est mon antre, ma caverne d’Ali Baba. Je suis très rigoureuse. Par exemple tous mes magazines sont dans des boîtes d’archives classées par année (ou par groupe d’années), les cartes postales sont dans des classeurs classés par éditeur. Je cherche sans cesse des façons de mieux archiver pour accéder le plus rapidement possible à l’information souhaitée. Et j’adore ça ! Je suis une vraie bibliothécaire Marilyn Monroe ! Même si quand vous rentrez dans ma pièce vous aurez toujours l’impression que c’est en désordre parce que des magazines se trouvent par terre, des bouquins aussi parfois et plein d’autres choses en vrac.

Gibet : C’est quoi la pièce dont vous êtes la plus fière ?

Laëtitia : Puisqu’il faut en choisir une, ce serait ma photo originale d’André De Dienes que j’ai gagnée voilà quelques années maintenant.

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Quant à sa pièce la plus farfelue, Laëtitia hésite entre cette chaise Louis XVI…

Gibet : À propos de rigueur, vous faites régulièrement des articles sur un élément précis de la carrière de Marilyn Monroe – le tournage d’une séquence, l’utilisation d’un vêtement, un photo shoot… Comment vous procédez pour établir ces articles ? Vous avez une mémoire d’éléphant ? Vous y travaillez beaucoup ?

Laëtitia : D’une certaine façon j’ai une mémoire d’éléphant. Quand ça fait près de 25 ans que vous tournez dans tous les sens la vie de quelqu’un, vous commencez à la maîtriser. Et puis j’adore ça donc forcément j’enregistre très bien les données. Quand je fais un article, c’est que j’ai envie de traiter un sujet plus qu’un autre. C’est l’envie de donner des informations précises. Je hais toutes les sottises qui sont dites sur Marilyn. Mon objectif est de la montrer telle qu’elle était.

Bien évidemment cela demande parfois un très gros travail de recherches. C’est un peu comme mettre le doigt dans un pot de Nutella, vous en voulez toujours plus, et moi ça m’arrive souvent. Je pars d’un truc qui me semble simple et puis tout à coup un détail va me dire « mais attends c’est quoi ça ? » et voilà ça part. Les recherches les plus pointues que j’aie faites actuellement concernent le film Les Hommes préfèrent les blondes. J’ai passé une année à étudier tout le film. J’avais des bouquins partout, j’ai ouvert des milliers de pages web… C’était démentiel mais qu’est-ce que j’ai appris ! J’adore recouper les informations. En fait le secret est de ne pas se contenter de Marilyn. Elle fait partie d’un ensemble, alors étudions cet ensemble. Donc oui, cela demande un énorme travail !

Gibet : Je crois que j’ai découvert votre blog quand vous étiez au premier tiers de Les Hommes préfèrent les blondes et c’est vrai que c’était un travail impressionnant. Où trouvez-vous tout ce temps ?

Laëtitia : C’est ce que tout le monde me pose comme question et je ne sais pas quoi y répondre parce que je sens cette vision : « elle ne fait que ça », « elle n’a pas de vie en dehors ». En fait je ne régis pas ma vie comme la plupart des gens. Oui cela demande du temps mais je ne fais pas ça tous les jours. Comme vous avez pu le constater je peux rester plusieurs jours sans rien poster ou bien juste une chanson, une photo. Je ne fais pas des dossiers à longueur de temps. Je ne vis pas pour mes passions mais par mes passions. J’éprouve le besoin de m’en éloigner un peu pour mieux les retrouver. En fait j’alterne. J’ai des frénésies de Marilyn comme j’en ai de Madonna, de manga, de cinéma, d’expositions… Et vous que faites-vous de vos journées ? Cela me fait penser à mon adolescence. Tout mon argent de poche passait dans les bouquins, magazines, cartes postales, disques… un jour mon père me l’a reproché et là je lui ai répondu : « mais moi je ne fume pas, je ne vais pas au café, je ne sors pas ». Eh bien mon temps c’est pareil, je le passe à me cultiver quand la plupart fait autre chose.

Gibet : Comment faites-vous pour trouver de nouveaux objets ?

Laëtitia : En fait c’est eux qui me trouvent. Avec Internet je pourrais largement accéder à de très nombreux objets à ma guise, c’est ce que font beaucoup de collectionneurs, mais moi j’aime le plaisir de découvrir au cours d’une brocante, d’une librairie, d’une rencontre. Une passion ce n’est pas fait pour rester derrière un ordinateur, cela se vit et ça commence par des rencontres. Au-delà de l’objet, j’aime qu’il y ait une histoire. Par exemple, l’été dernier, dans une brocante j’ai trouvé un lot de vinyles de Madonna et là, au milieu, une pièce magnifique, très rare que j’ai eu pour une bouchée de pain en plus ! Je ne m’y attendais pas, il m’attendait tout simplement et du coup je l’adore bien au-delà de sa valeur marchande !

J’aime que les objets racontent quelque chose. Cela m’est arrivé il y a quelques années avec une statuette de Marilyn. Je ne cours pas après ce genre d’objets mais là, toujours sur une brocante, de loin (forcément) j’ai vu cette statuette. Je l’ai reconnue, je savais que c’était une pièce rare, j’ai demandé le prix et là énorme surprise, un tout petit prix ! Je l’ai achetée et elle est là à me regarder sur mon bureau. Beaucoup de mes objets ont une histoire parfois amusante, touchante, singulière ou toute simple. Au final ce sont elles qui ont le plus de valeur.

Gibet : Êtes-vous en relation avec une communauté de fans et collectionneurs ?

Laëtitia : Avec les années j’ai rencontré beaucoup de gens et je dis bien rencontré. Avec Internet, vous pouvez contacter le monde mais voir les gens en vrai c’est autre chose. Qu’importe les passions, j’ai toujours agi ainsi. C’est un réseau en fait. Comme toute communauté certains ont leur petite gloire et d’autres restent très discrets. Chacun vit sa passion différemment et logiquement vous restez principalement en contact avec des personnes qui ont une relation similaire à la vôtre avec Marilyn. Pour moi ce sont des personnes qui aiment autre chose en dehors de Marilyn. Les communautés de fans sont un monde étrange et parfois très effrayant. Une vraie étude sociologique à faire.

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… et ces paquets de mouchoirs en papier.

Gibet : Est-ce que vous notez souvent des erreurs biographiques quand vous regardez des documentaires ou lisez des livres sur Marilyn Monroe ? Si oui, avez-vous un exemple de docu ou livre particulièrement fautif ?

Laëtitia : Il y en a tout le temps. C’est très dur d’aller au-delà des stéréotypes. Les personnes qui font les documentaires ne sont pas des historiens et puis lorsque vous parlez de Marilyn c’est l’image qui compte. Le documentaire qui m’a le plus écœuré ces dernières années est celui de Patrick Jeudy d’après le roman de Schneider, Marilyn dernières séances. Un véritable ramassis d’ordures. Le livre d’après lequel il a été fait est un amas d’immondices qui m’ont fait pleurer devant ma télé.

Concernant les livres, il faut absolument éviter les romans comme celui-là ou celui de Oates ou ceux de Mailer… Ce sont les pires parce que ce ne sont que des fantasmes d’écrivains. Cela m’écœure parce qu’ils sont toujours vendus comme des biographies alors que ce ne sont que des romans c’est-à-dire imaginaires. Ils font beaucoup de mal à Marilyn parce qu’ils la font passer pour une névrosée parfois nymphomane… C’est une honte ! En livre il y a beaucoup de déchets.

Gibet : Je partage votre rage, et j’essaie souvent de démonter ce genre de livres ici même. Qu’est-ce qui vous a spécifiquement agacé dans Marilyn, dernières séances ?

Läetitia : Madonna m’a appris que cela ne servait à rien de s’énerver même si parfois c’est très dur, vous ne changerez pas les cons. Moi je préfère faire mon blog et montrer aux gens de passage une image réelle de Marilyn. C’est par exemple ce que j’ai fait avec Max Factor dernièrement. Je n’ai pas envie de donner trop d’importances à ces conneries de bouquins, en parler même en les démontant ne fait que leur donner du crédit, il n’y a rien de concret qui peut sortir de là. Et puis je préfère consacré mon temps à faire ce que je fais et je pense que je sais bien faire.

J’avoue n’avoir jamais lu Marilyn dernières séances. Rien que pour le fait que ce que j’en ai vu et lu m’a donné envie de vomir. Je l’ai dans ma bibliothèque, je l’ai trouvé en brocante pour 1€. J’ai hésité à le prendre comme si j’allais salir mes mains mais j’ai franchi le cap… peut-être qu’un jour j’oserai le lire. Mais j’ai du mal à penser que je le possède, cela me fait mal. Dire de Marilyn qu’elle est une névrosée nymphomane est une insulte à ce qu’elle était et c’est une insulte envers les femmes en général. Quoi de mieux que de s’en prendre à un symbole magnifique de la féminité pour salir l’indépendance acquise des femmes ? Marilyn a lutté toute sa vie pour avoir un peu de respect, cela n’a pas été facile. Elle a dû affronter ses démons : ne pas avoir de famille, se sentir éternellement rejetée. Elle a vécu dans un univers très masculin où la femme était soit une mère soit une putain. Elle a utilisé sa sexualité non pas parce qu’elle le voulait aveuglément mais parce qu’à l’époque c’était promotion canapé au sein des studios. Et puis pour elle sa beauté amenait un semblant d’intérêt, d’amour alors pourquoi le refuser ? Elle était belle et a su tirer partie de sa beauté pour avancer. Où est le crime ? Ce n’était pas ses règles du jeu mais bien celles d’un monde gouverné par les hommes ! et elle a su en tirer partie.

Certains diront qu’elle a eu plein d’hommes dans sa vie ce qui prouve qu’elle était certainement un peu nymphomane. Je leur répondrais : si Marilyn avait couché avec tous les hommes qui disent avoir eu une liaison avec elle, elle n’aurait jamais eu le temps de faire aucun film ! Névrosée ? Pourquoi ? Se sentir seule, dépressive, c’est être névrosée ? Elle a eu besoin de faire un séjour en clinique et alors ? Être dépressive c’est mal ? Moi je trouve qu’elle a bien su remonter la pente ! Sacré bout de femme ! Moi je l’admire, elle avait un sacré caractère ! et de toute façon pour faire son job et faire face aux studios fallait être vraiment très forte. Elle est loin d’être la pauvre petite victime que l’on nous vend depuis tant et tant de décennies. C’était une battante mais parfois la vie est dure et vous donne des coups qui sont encore plus durs à encaisser. Malgré tout elle a su avancer.

Gibet : Si vous deviez conseiller un livre sur Marilyn Monroe, ce serait lequel ?

Laëtitia : En livre, c’est bien difficile à dire. Tout dépend du style recherché : livre de photos, biographies, dictionnaire… L’un de mes derniers très gros coups de cœur c’est Une blonde à Manhattan, qui est plus un livre sur Ed Feingersh que sur Marilyn. Pour la première fois j’ai vu la Marilyn que je connaissais, c’est-à-dire une femme bosseuse, courageuse qui a parfois du mal mais qui veut toujours avancer.

Gibet : « une femme bosseuse, courageuse qui a parfois du mal mais qui veut toujours avancer »… comme vous ?

Laëtitia : « Flattez-moi mon bon Blaze ». Sincèrement, Marilyn est un exemple. C’est une femme forte qui a su affronter la vie avec tout ce que cela comporte. C’est aussi pour ça que j’aime Madonna. Au final c’est ce qui les rapproche le plus : être une femme dans un monde d’hommes et ne pas avoir peur d’être ce qu’elles veulent. Elles ne se sont jamais posé en victimes et c’est pour ça qu’il existe un énorme malentendu avec Marilyn. Quand vous regardez sa vie, vous devenez très vite admiratif de son obstination, d’ailleurs elle disait : « je veux simplement être merveilleuse ». Ce n’était pas par vanité, elle voulait atteindre une certaine idée de la perfection comme pour se rassurer d’être capable de faire quelque chose de bien alors qu’elle n’était rien. Elle est partie de très bas. Elle n’avait pas réellement de famille même si son enfance n’a pas été si glauque que ça. Elle a vécu des moments très durs pour une enfant, elle a été mariée à 16 ans mais elle s’est toujours accrochée à ses rêves. Elle était obstinée. Miss Snively (la patronne de l’agence de mannequin avec qui Marilyn a signé son premier contrat en 1945) disait à ses nouvelles recrues qui lui demandaient comment devenir Marilyn Monroe : « si vous possédez seulement un dixième de son courage et de sa jugeote, vous serez sortie d’affaire ». Elle n’a jamais cessé de travailler pour s’améliorer même lorsqu’elle était au sommet. Elle n’a jamais voulu rien obtenir par les autres. Quand Hyde en 1950 lui a proposé son argent, son pouvoir pour faciliter son futur, elle a refusé pourtant c’était s’assurer une vie sans soucis ! Elle a refusé de jouer éternellement les blondes idiotes, elle a créé sa propre maison de productions en changeant son contrat avec la Fox (première à Hollywood) en 1962 alors qu’elle avait été virée de son dernier film, elle a réussi à renégocier (une fois de plus) son contrat ! C’est impressionnant ! Mais ça nous ne le voyons jamais et cela ne peut se voir que si l’accent est mis sur ces différents points et aller plus loin que l’image sublime de blonde pas si idiote que ça.

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Gibet : C’est quoi votre film préféré de Marilyn Monroe ?

Laëtitia : Bonne question ! Cela fait très longtemps que je n’ai pas vu ses films. Mais je dois bien avouer que Niagara me fascine. Pour le Technicolor, parce que c’est un vrai film noir, pour une Marilyn meurtrière des plus diaboliques, pour la beauté des chutes du Niagara… en fait ce film est presque parfait.

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